Femme-piano (1981/1997)
Pantin 81
Les années 80 commencent et Barbara décide de se lancer un
nouveau défi, loin du velours des théâtres, elle décide d’aller garer sa
loge-roulotte (prêtée par Jean Richard pour l’occasion) près d’un chapiteau de
cirque planté dans un terrain vague dans lequel elle fera vivre un spectacle
tout en lumière (rayons laser et projecteurs) qui va révolutionner sa carrière
et sera un véritable tournant.
Pendant un mois, près de 3000 personnes chaque soir vont
frissonner au son des mille chevaux d’écumes qui galopent dans le cœur de la
dame quand Roland Romanelli à l’accordéon
électronique et Gérard Daguerre aux claviers l’accompagnent. C’est à Pantin que
sera créée la chanson Regarde, Hymne au président nouvellement élu.
Ce spectacle est un triomphe et le public ne s’y trompe pas qui
vient de plus en plus important, mais surtout de plus en plus jeune. La plupart
des spectateurs ont entre 16 et 25 ans et ils découvrent ébahis l’univers d’une
Barbara toute en sincérité, parfois très noire, mais qui ne se prend jamais
très longtemps au sérieux. Les grand succès tels le mal de vivre, le soleil
noir ou perlimpinpin sont au rendez-vous, parfois transformés souvent magnifiés
par la voix puissante mais cassée de la chanteuse qui dès lors imposera son
nouveau style celui d’une Barbara nouvelle : La prêtresse d’une grand
messe informelle ou la seule religion est la tolérance et le partage avec son
public, sa plus belle histoire d’amour !
« Pantin la bleue, Pantin la belle,
Aux grisailles de White-Chapell.
Pantin Novembre, presque
l'hiver.
Les arbres se déshabillaient
Et, de prairie en champ de
blé,
Vous avez bousculé le ciel,
Vous avez repoussé l'hiver
Et réinventé les étés
(…)
Pantin espoir, Pantin
bonheur,
Oh, qu'est-ce que vous
m'avez fait là ?
Pantin qui rit, Pantin j'en
pleure,
Pantin, on recommencera.
Pantin merveille, Pantin
miracle,
Oh, mille Pantins étoilés,
C'est l'amour dans la
lumière
Et pleurs dans leurs
doigts, cachés.
Pantin folie, Pantin
vaisseau
Au bout de nos cœurs
étoilés,
Nous avons planté des
soleils
Plus flamboyants que des
étés ! »
(Pantin [extraits de la
Chanson]-1981 -Barbara/Barbara)
- Composée lors de la
dernière du spectacle à Pantin -
Récital
« Pantin 81 »
Un tel événement méritait un
enregistrement à la hauteur, un enregistrement sur lequel je l’ai découverte
(en boucle).
Barbara, chapeautée, pose sur
la pochette assise sur un escalier de l’édifice installé à l’occasion du
spectacle.
1982
Tournée
le 5 novembre, passage à la
télévision du spectacle Pantin 81, puis sortie de la cassette Vidéo « Barbara à
Pantin »
(réédition depuis en DVD - PCM stéréo)
Réalisateur : Guy Job, Assistante :
Barbara !
Elle avait accepté que le
récital soit filmé à condition que les caméras soient cachées sous des draps
noirs et qu’elle participe activement au montage (qui dura 6 mois). Champs et
contrechamps n’avaient alors plus de secrets pour elle, qui mixa les images
d’un soir avec le son d’un autre, choisissant chaque séquence avec le plus
grand soin et se payant le luxe d’être filmée d’en haut (des caméras ayant été
placées dans les cintres au dessus du piano et au milieu de la scène).
Certaines chansons sont mieux chantées et le son globalement meilleur que sur
l’album du spectacle.
1982 à 1985
Les années qui suivront Pantin seront marquées par un retrait de
la scène et des studios dans le doute et avec la peur de ne plus pouvoir
chanter, mais aussi par l’écriture de Lily Passion dont le sujet est alors
« l’histoire d’un chanteuse qui perd sa voix ».
Plusieurs versions seront alors écrites, puis réécrites avant
d’être abandonnées. Des metteurs en scène et des arrangeurs prestigieux se
verront écartés du projet, d’autres seront appelés en renfort avant de s’en
aller voir plus loin. Barbara sait tellement ce qu’elle veut qu’elle ne sait
plus… si elle le veut vraiment. Même son ami et accompagnateur de toujours
Roland Romanelli s’en ira pour divergences de vues…
Une version en studio orchestrée par William Sheller sera aussi enregistrée…
avant que de disparaître dans un coffre (peut être pas pour toujours ?).
Lily Passion est plus qu’une comédie musicale pour notre Barbara, qui se
cherche, encore et toujours, de réécriture en annulation de dates.
Pendant 3 ans, elle suivra une rééducation vocale qui aboutira à
une récupération quasi complète de sa voix chantée, mais débuteront des ennuis
de santé plus graves, d’origine respiratoires et musculaires qui l’amèneront à
fréquenter de plus en plus souvent les hôpitaux.
Fin 1985, à la demande d’Alice donna elle participe à
l’enregistrement de « la chanson de la
vie » pour l’association CARE et pour la première fois présente
au public sa voix réparée , elle débute la chanson,
suivie par beaucoup d’autres femme interprètes. Les répétitions de Lily Passion
avec Gérard Depardieu commencent.
1986
Lily Passion
Le spectacle est enfin une réalité. A deux pas de Pantin le
Zénith vient d’être bâti et le couple Barbara-Depardieu s’y installe pour près
d’un mois. L’histoire d’un assassin blond (David alias Depardieu) qui suit à la
trace une chanteuse célèbre (Lily alias Barbara) et qui tue dans chaque ville
où elle chante… Lily le découvre et décide de suivre sa trace pour l’arrêter,
s’en suit une histoire d’amour, Mais Lily ne peut rester trop longtemps loin de
son public pour qui elle sacrifie sa vie de femme « j’ai passé plus de
nuits à chanter, que de nuits dans les bras d’un homme…(…) » (extrait
d’une chanson du spectacle). Elle décide d’arrêter la chanson, il lui promet de l’emmener
loin, sur son ile aux mimosas, et Lily-Barbara se prends à rêver… « Emmène-moi dans ton
île, loin des folie de la ville… » « Toi que j’ai souvent
cherché… à travers d’autres regards et si l’on s’était trouvé et qu’il ne soit
pas trop tard ? Pour le temps qu’il me reste à vivre, je stopperai
mon piano-ivre, pour pouvoir vivre avec toi, sur ton île aux
mimosas ! » (L’île aux mimosas –extrait- chanson - 1986). Mais… Lily ne restera pas loin
de son public et décidera de quitter David…
Bien entendu très largement autobiographique, cette comédie
musicale est presque une auto-analyse en public, Barbara s’y livre énormément,
mais l’air de rien. Plusieurs niveaux de lecture sont possibles, surtout à la
lumière de ce que nous connaissons de la vie de femme de la chanteuse. C’est un
beau spectacle qu’il faut écouter plusieurs fois pour en tirer toute la
quintessence, mais quand on aime… Une version filmée en vidéo existe de ce
spectacle mais n’est jamais sortie, Barbara en avait commencé le montage au
moment de sa disparition, peut être un jour ?...
Sortie du
disque (double album), puis tournée à travers la France.
Mikhail Baryshnikov
et Barbara se retrouvent au Metropolitan-Opera de New York, Il danse sur ses chansons pendant le
spectacle
1987
Concert au
châtelet
Barbara investit le théâtre
prestigieux des bords de seine et illumine les soirées de trois générations
venues la (re-)découvrir. Roland Romanelli
n’est désormais plus des soirées de lumières de la dame en noir mais Gérard
Daguerre le remplace, accompagné de Marcel Azzola,
Jean Louis Hennequin et Michel Gaudry. Création de Sid’amour à mort, grande chanson qui traite
avec pudeur d’un sujet difficile
« Si s'aimer d'amour
C'est mourir d'aimer
Sont mourus d'amour
Sida sidamnés
Les damnés d'amour
A mourir d'aimer
Ils sont morts d'amour
D'amour sidamnés »
(extrait)
Quand je serais morte enterrez-moi,
Dans un piano noir comme un corbeau
Do, ré, mi,fa, sol, la, si, do !
(Le piano noir – chanson- Robert Charlebois)
Reprise de l’Ile
aux mimosas avec : le public dans le rôle de Gérard
Depardieu !
« Pour le temps qu’il me reste à vivre,
Je stopperai mon piano-ivre,
Pour pouvoir vivre avec toi,
Sur ton île aux mimosas ! »
Volume 1 et volume 2 de
l’enregistrement « Chatelet 87 »
1987/88
Tournées en France et au Japon
1989
Barbara, de retour à Précy, fait
installer une ligne téléphonique sur laquelle les malades du sida peuvent
l’appeler jour et nuit. Elle consacre une année entière à faire de la
prévention en visitant les prisons et en y organisant des concerts gratuits.
1990
Mogador 90
Retour aux sources dans le théâtre où elle se
produisit pour la première fois plus de
quarante ans plus tôt. Elle y interprète la plus bath des java, Rêveuses de parloir (une chanson dédiée aux femmes emprisonnées qu’elle connait de près, Vol de nuit (une histoire d’amour en plein vol), les enfants de Novembre (en hommage
au jeune étudiant Malik Oussekine, qui trouvera la
mort molesté par la police lors d’une manifestation), Coline (écrite par jacques Attali), et Gauguin (lettre à Jacques Brel).
« Je signe Léonie,
Tu sais bien qui je suis,
Dors Bien ! »
Gauguin (lettre à Jacques
Brel) –[Barbara/Barbara]- Chanson 1990
Sortie du
double CD du spectacle de Mogador 90, intitulé « Gauguin »
1991
Enregistrement
des lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke
1992
Création de
l’intégrale en 13 CD réalisée par Barbara qui réécoute sa discographie et
sélectionne quelques interprétations inédites.
1993
Chatelet 93
Retour au châtelet pour près
de deux mois, du 6 novembre au 31 décembre, après l’annonce en avril d’un
palais des congrès annulé pour raisons de santé. A peine la musique
d’introduction du spectacle commencée, le public est debout, applaudissant,
tapant du pied, c’est un triomphe quasi instantané. Malheureusement le
spectacle est interrompu un mois plus tard. Barbara est malade et les médecins
lui interdisent de revenir. Les billets réservés sont repoussés, puis
finalement annulés. Chaque soir une foule de spectateurs se presse devant le théâtre
dans l’espoir d’une reprise, Barbara, elle, loge dans un hôtel tout près, dans
l’espoir de reprendre. Elle reviendra pour trois soirs, juste à temps pour
l’enregistrement du spectacle. Reprise de la chanson Lily de Pierre Perret, Création de
la chanson-espoir le jour se lève encore, Pleure
pas,
Femme piano lunettes (version parlée), Sables
mouvants.
Je l’ai vu rapidement le
dernier soir à la sortie des artistes elle était très fatiguée mais très en
voix et je dois dire que j'étais de ceux qui regrettaient qu'elle n'enregistre
plus en studio. Ce soir là donc, je la remercie chaleureusement pour le très
beau spectacle qu'elle venait de nous offrir et je lui demande : "s'il
vous plaît, faites-nous un album studio !". Elle me regarde interloquée et
presque fâchée, hésite, lâche un grand sourire et s'exclame : "Pas ce soir en tous cas !!!" . Trois années plus tard, alors
que les assurances lui interdisait de chanter en public elle retrouva les
chemins des studios après 16 années sans enregistrement, peut-être s'est elle
souvenue de ce soir au châtelet...
Dernier enregistrement en public
« Chatelet 93 »
1994
Dernière
tournée
Contre l’avis des médecins
elle part en tournée à travers la France et en Belgique jusqu’au soir du 26
mars 1994 à Tours où elle se produit pour la dernière fois de sa vie. A la fin
du spectacle, elle traversera la salle au milieu du public, les bras tendus en
signe d’adieu. Elle ne dira rien mais prendra ce soir là la décision de quitter
« son amant de mille bras ».
1995
Elle réfléchit à l’écriture
des ses mémoires et commence à contacter les gens croisés sur son chemin. Ce
projet prend forme dans l’année 1997,
« Il était un piano noir, mémoires
interrompus », éditions Fayard
- paraîtra début 98.
1996
Dernier album
studio
Les médecins et les assurances
lui interdisent la scène, soit, mais pas la chanson ! Elle décide qu’elle
écrira peut être pour les autres mais avant ça elle s’entoure des plus grand musiciens
du moment dont jean louis Aubert qui lui écrira une chanson et réalisera
l’orchestration d’une autre, Gérard daguerre, Richard
Galliano, Loïc Pontieux,
Jean Louis Hennequin, Didier Lockwood,
Dominique Mahut, Doc Matéo, Laurent Vernerey, Eddy Louiss, Patrick Bessot, Jean Marie Ecay…
« Je croyais avoir quitté, à Tours,
ceux qui m’aiment. J’ai compris que, pour ne pas leur être infidèle, je leurs
devais, faute de scène, un disque, mais un disque conçu à la manière d’un
récital. »
Après 16 ans d’absence loin
des studios, Barbara sort un disque tout neuf très bien réalisé, très moderne,
un témoignage-testament à son public.
Il me revient, A force de, Le couloir, Le jour se lève encore, Vivant poème, Faxe-moi, Fatigue, Femme piano, John Parker Lee, Sables mouvants, Lucy, Les enfants de Novembre
Juste avant le bouclage final,
le disque prêt à sortir, dans la stupeur générale, elle décidera de tout
réenregistrer trois jours durant et de revoir le mixage, préférant mettre les
brisures de sa voix très en avant. A la parution du disque elle dira « je suis ok avec cette femme là ».
1997
Barbara nous
quitte
Un aigle noir s’envole à
jamais. L’envol de la longue dame brune autrement appelée la dame en noir, plus
simplement b a r b a r a ou plutôt humblement puisque, l’aviez vous
remarqué ? Très souvent sur ses disques ce prénom ne débutera pas par une
majuscule, un détail qui en dit long.
Adieu Madame et comme vous le chantiez
si bien Je vous remercie de vous !